jeudi 7 janvier 2010

Livre : Qui s'occupe encore d'Yngve Frej ?



J’apprécie mon libraire. Et je l’estime d’autant plus qu’il voue un véritable intérêt à la culture nordique. Dans sa petite librairie trônent de temps à autre quelques bouquins scandinaves à déguster ou à dévorer. J’en ai lu certains. Il en a lu d’autres. C’est d’ailleurs lui qui m’a invité, non sans une certaine insistance je dois dire, à ouvrir un bouquin de Stig Claesson, auteur suédois très connu dans son pays d’origine mais dont l’œuvre n’a pas été publiée dans son intégralité en France. Il m’a même fait une réduction de 3€ . Autant d’acharnement cache forcément quelque chose. De bon ou de mauvais. J’ai donc lu le bouquin.
Et je l’ai aimé.

Résumé



L’histoire se déroule au cœur de l’été, dans un petit hameau forestier de Suède, perdu dans le silence, loin de la ville. Après avoir travaillé laborieusement durant des décennies, un cordonnier pour qui l’heure de la retraite a sonné, s’interroge sur son devenir et celui de ses voisins, aussi âgés que lui sinon plus. Comment vont-ils vieillir ? Devront-ils être placés dans un établissement à la ville ? Parviendront-ils à occuper leur temps libre ? Une crainte se dessine : s’ils devenaient des « monuments historiques » ?
Un matin, alors qu’il se dirige vers sa boîte aux lettres pour ôter la pancarte mentionnant la présence de son atelier, l’ancien cordonnier, par une sorte de gag involontaire, la remplace par un panonceau « monument historique ».
Une indication qui ne laisse pas de marbre les rares visiteurs de passage dans ce petit coin calme de Suède. Les voici arrivant au hameau, à la recherche du fameux « monument historique ».
Et les petits vieux, loin de perdre contenance, se mettent alors à vanter les mérites d’un site vaguement abandonné au règne végétal, dont la résonance historique (quasiment nulle) n’est un prétexte pour nourrir l’imaginaire des visiteurs.
Parmi ces touristes, un jeune couple de Stockholm décide de passer quelques jours au hameau. Une jolie rencontre entre deux générations et deux « civilisations ». L’urbaine et la rurale. L’urbaine s’intéressant au silence, au mode de vie et à l’artisanat des vieillards. La rurale, dotée d’une bienveillance touchante mais repliée sur elle-même. Se méfiant de ces citadins dont elle ne connaît la vie que par le prisme biaisé de la télévision.


Un roman prolétaire

Le bouquin est selon moi réussi parce que Claesson livre une écriture à l’image de son scénario, de la nature environnante et de ses personnages. Les mots sont humbles et frôlent parfois les limites du naïf. Mais au-delà de cette simplicité de surface se dessinent des thèmes plus profonds et chers à l’auteur, comme le socialisme et la liberté. Claesson s’est en effet toujours senti attaché au monde des petits paysans et des laissés pour compte.
A la fois libres et prisonniers d’un système, ces vieux, reclus dans leur forêt, enracinés dans leur terre, voient le monde changer et les campagnes se dépeupler, sans pouvoir véritablement agir. Un constat qui aiguise des problématiques au-dessus desquelles ces anciens ne s’étaient pas penchés (solitude, travail, loisirs).
Le travail par exemple, dans sa répétition inlassable, ne leur avait pas permis de réfléchir à leur avenir. Ils croyaient sûrement que le labeur les tueraient, comme il avait tué leurs parents...
Mais c'était sans imaginer que désormais, nous ne mourrons (presque) plus au travail. Et qu'avant l’heure de la mort, il y a celle du temps libre et la détente…

L'histoire a été adaptée pour la télévision suédoise en 1973.

6 commentaires:

  1. Tu lis le suédois ET le norvégien?
    (chapeau)

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  2. Salut Olivier,

    J'ai lu le bouquin en français mais il n'est désormais plus édité dans la langue de Molière. Je photographierai la couverture française ce soir. En attendant, j'en ai mis une suédoise !

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  3. merci pour cet article ( et pour le blog aussi!!)
    j'ai une envie folle de le lire à mon tour ce livre!
    mais il y aurait moyen d'avoir des renseignements sur l'édition française ? j'aimerai le trouver
    merci

    *Cirec*

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  4. Bonsoir Cirec,

    La seule maison d'édition ayant traduit ce bouquin s'appelait "Plein chant" mais son fondateur (et unique employé) est parti à la retraite. Il avait lui-même fait installer ses presses dans la ferme qu'il habitait et allait acheter son papier en Italie. C'était le bon vieux temps.
    Le livre est sorti en 1986. Tu peux toujours essayer d'écrire aux Editions "Plein chant", 16120 Bassac. Peut-être qu'il reste encore quelques livres poussiéreux sur des étagères oubliées...Peut-être même que le gars vit encore dans sa ferme...

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  5. Merci pour les renseignements!!
    je te tiens au courant si jamais j'arrive à le dénicher!! ça va pas etre facile!!

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  6. C'est une jolie histoire qui donne vraiment envie de lire le livre dont tu as fait un résumé très tentant. Bonne soirée Eddy.

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