mardi 27 avril 2010

Knut Hamsun : Victoria

Il y a quelques semaines, je recevais un pli de la maison d’édition Gaïa, spécialiste des littératures nordiques et baltes. A l’intérieur : trois ouvrages, que je m’étais promis de lire en toute hâte, avant d’en être empêché par des contraintes professionnelles.
Fort heureusement, les vacances sont arrivées et je profite de quelques jours de repos pour me plonger de nouveau dans une littérature qui m’est si chère.

Parmi les grands littérateurs que comptent les pays nordiques, Knut Hamsun reste l’un de mes préférés. C’est lui qui à travers des descriptions très impressionnistes de paysages norvégiens, m’a donné le goût de fouler les terres sur lesquelles il avait marché. Lui qui plus que tout autre a su avec lyrisme, exaltation et révolte, poser les mots justes sur des émotions que l’on peine parfois à définir. Victoria est un mélange de tous ces ingrédients. A l’époque où Knut Hamsun l’écrit, il vient de se marier avec Bergljot Bech. Il est en voyage de noces. Peut-être s’interroge-t-il sur l’amour qu’il porte à Bergljot, lui qui était un séducteur né et ne cessait de confronter réalité de l’amour et rêves d’amours romanesques.


Victoria est le roman d’un amour impossible entre deux êtres. Johannès est le fils d’un meunier et Victoria, la fille d’un châtelain désargenté, mû par l’indéfectible projet de la marier à un lieutenant.

Johannès et Victoria se rencontrent alors qu’ils sont très jeunes. Le petit garçon est un rêveur. Il invente des histoires pour gagner le cœur de sa dulcinée. Puis il écrit des poèmes. L’adolescence à peine arrivée, il part étudier en ville. De temps à autre, il retourne rendre une visite à ses parents et croise Victoria, pour qui ses sens se soulèvent toujours autant. Attraction et répulsion s'entremêlent, les deux amoureux s’embrassent, se donnent rendez-vous, se déclarent leur flamme mais rien n’y fait ;  leur orgueil et leur appartenance à deux classes sociales différentes les gèlent dans des conventions desquelles ils ne peuvent s’extraire. Ils se perdent, se retrouvent quelques années plus tard mais ne parviendront jamais à s’aimer à temps. Car au moment où tout devient possible, l’un des deux meurt.

Plus qu’une intrigue amoureuse romantique, Victoria est donc une tragédie qui frappe en plein cœur. La violence du sentiment amoureux gronde et se révolte en silence, fissurant petit à petit des êtres ravagés par la sensibilité. Dans les romans de Knut Hamsun, cette émotivité à fleur de peau est souvent l’apanage des personnages masculins, victimes de la dureté féminine. Contrariés et noyés dans des tourbillons d’émois, il ne recherchent finalement qu’un amour pur que des femmes distantes, complexes et souvent déjà engagées ne peuvent leur offrir.

A première vue, ce roman pourrait s'apparenter à une bluette remplie de clichés mièvres mais c'est sans compter la pureté des mots choisis par Hamsun et sa force d’expression, qui abolit toute naïveté. La plume est cristalline, et chaque page tournée est une promesse d’émotions. Comme ce passage, en toute fin de roman, où l’un des personnages s’adresse à Johannès, qui vient d’apprendre la mort de Victoria « Naturellement, on ne peut pas avoir celle que l’on aime. Et si par hasard, ou par justice, on l’obtient, elle meurt aussitôt après. Il y a toujours un hic. Et l’homme est obligé de chercher un autre amour, aussi bon que possible, sans en mourir pour autant [..]. Vous n’avez qu’à me regarder ».

2 commentaires:

  1. Dans le même genre qui fini bien, il y a "orgueil et préjugés"....ce livre a l'air magnifique, mais quelle tristesse..beau résumé, ça donne envie de le lire!

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  2. >Fanny, le livre d'Hamsun est en effet très beau, triste certes mais on trouve parfois plus de joie dans la tristesse qu'on ne peut en trouver dans la joie !

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